Témoignage d’une travailleuse du sexe dans le cadre de la Commission judiciaire et de la police du Grand Conseil de Genève

«Mesdames et Messieurs les commissionnaires,

J’aimerais commencer par vous remercier pour cette opportunité que vous nous donnez aujourd’hui de nous exprimer devant vous.

Nous pourrions comprendre que le PL 10868 se préoccupe du voisinage entre prostitution et écoles: nous sommes pour la plupart d’entre nous mères aussi.
Pourtant, ce PL nous étonne: aucune d’entre nous ne travaille en face ou à côté de l’école des Pâquis.

Nous nous étonnons aussi d’être associées aux dealers de drogue. En effet, nous passons nos journées à essayer de nous distancer des dealers qui font fuir les clients, nous agressent parfois, et face auxquels nous nous sentons impuissantes. Les problèmes de criminalité qu’il y a aux Pâquis ne sont en tous les cas pas de notre fait. Au contraire, nous aimerions que des mesures efficaces soient prises pour juguler cette plaie.

Certes, le choix de travailler dans la rue n’est pas un choix facile. Pourtant, rapidement, on peut comparer le travail de rue et le travail dans un salon ou dans un sex center. Le travail de rue apporte indépendance, absence de contraintes (contraintes de tarifs / prestations / horaires / alcool), permet de ne pas partager ses gains avec un gérant de salon, améliore notre situation économique et nous permet de ne pas avoir recours à l’assistance sociale. Il apporte enfin un revenu permettant d’entretenir nos foyers, de s’affilier aux assurances sociales et d’honorer des impôts. Bref, le travail en tant qu’indépendante nous permet d’accéder à une vie et à un budget équilibré, vie que nous considérons comme parfaitement normale malgré tous les préjugés et toutes les discriminations que nous rencontrons.

C’est pour toutes ces raisons, qu’en mon nom et au nom de mes collègues, je vous demande de refuser le PL 10868. Un tel projet de loi alimentera encore la discrimination et nous poussera à nouveau, nous les artisanes indépendantes, vers une plus grande précarité économique.»
Angelina.

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